Samedi 18 Septembre 2021
102km – 5400mD+
Laissons le suspens de côté, il s’agit-là d’un échec
cuisant, avec un abandon au km 86, alors même que je pointais quasiment depuis
le départ en 12è position et que la grande majorité du dénivelé était derrière
moi. En cause, des douleurs sous les pieds et aux chevilles qui m’empêchent de
courir et presque de marcher.
Tout avait pourtant bien commencé. Parti sur un rythme
« à risque », sur la limite, comme d’habitude parce qu’on ne refait
pas et que c’est aussi ça qui fait mon plaisir, je campe solidement en 12è
position depuis le départ. Excès de confiance ?
Parcours assez roulant avec une majorité de montées pendant
les 47 premiers km, au moment où, arrivés presque au sommet du Ventoux, on
bascule de l’autre côté. Une grande descente, puis une partie plus technique
lorsqu’on traverse les éboulis. La fatigue se fait déjà sentir, mais sans
excès, comme cela doit être au bout de 50km.
Arrivé au ravitaillement du km55, là où l’organisation a
acheminé notre sac de délestage, j’en profite pour faire le point : j’ai
consommé tout ce que j’avais emporté dans mon premier sac, je n’ai qu’à le
remplacer par celui que j’ai préparé à l’avance. Je suis fatigué mais pas outre
mesure, néanmoins j’ai un peu mal aux chevilles et aux tendons d’Achille, alors
je prends les bâtons que j’avais mis dans le sac de délestage, ils me
soulageront dans la remontée jusqu’au sommet du Ventoux puis dans la grande
descente de 15km qui s’ensuivra. Quelques étirements du dos et des jambes, et
je repars requinqué.
Je gère la montée correctement, peut-être un peu trop vite
parce que j’encaisse mal la transition avec la descente. Là le terrain est
particulièrement technique, avec beaucoup de passages dans les caillasses du
Ventoux. J’ai clairement un coup de mou, je m’alimente, prends un gel type
« coup de fouet », et fais le dos rond en marchant pour m’économiser.
Je me fais dépasser par les 2 concurrents que je vois depuis le départ et que
j’avais distancés dans la montée, mais vu la difficulté technique, le temps
perdu n’est pas si important.
Le passage à vide ne dure pas trop, tout au plus les 3 ou 4
premiers km les plus compliqués de la descente. Un petit replat sur une piste
large me permet de relancer l’allure et de constater que les choses sont
rentrées dans l’ordre. Je termine la descente en ayant même repris et
re-distancés mes 2 compères. Je pointe au ravitaillement du km76 et refais le
point : bien fatigué, mais comme tout le monde ; les pieds et
chevilles commencent à me faire souffrir, mais c’est supportable.
Malheureusement, leur état se détériore exponentiellement
pendant les 10 km qui suivent, en particulier lors d’un passage en crête bien
technique et qui les sollicite beaucoup. La redescente jusqu’au ravitaillement
en eau du km 86 devient compliquée, très compliquée.
Le coup au moral est trop gros pour moi ; me revient à
l’esprit le spectre du Trail de l’Oisans et du calvaire subi lors des 15
derniers km. Peut-être suis-je mentalement plus tendre aujourd’hui qu’il y a 2
mois, plus fragile, en tout cas je n’ai pas envie de revivre, 2 fois de suite,
le même épisode.
Il y a pas mal de bénévoles et d’accompagnants au
ravitaillement. Inversement à l’Oisans où j’avais refusé d’écouter les
secouristes qui me conseillaient d’abandonner, cette fois on m’encourage, on
m’exhorte même à ne pas renoncer. « Tu peux pas arrêter après tout ça,
t’es dans les premiers », « t’es tellement loin des délais »,
« même à 2 à l’heure tu termines largement dans les délais »,
« pas si près de l’arrivée », etc…
Aux petits soins pour moi, ils me donnent à manger, à
boire ; voyant qu’il va leur falloir du temps pour me convaincre de
revenir sur ma décision, ils trainent des pieds pour me rapatrier, cherchent
des prétextes, me demandent de m’arrêter un moment, 1h s’il le faut, pour
réfléchir et pouvoir repartir ensuite. « regarde l’heure qu’il est, tu as
tout ton temps ! »
Le problème, c’est que c’est articulaire, et que le temps
joue en ma défaveur : plus j’attends et plus le refroidissement raidit mes
chevilles, potentialise les douleurs. Je fais quelques essais, mais au bout
d’un quart d’heure, je peine à tenir debout ; le simple contact avec mes
chaussures est douloureux. La fièvre arrive, je mets mes manchettes, mon
coupe-vent, et me mets au soleil, malgré tout je tremble. On me donne 1g de
doliprane.
Pour l’anecdote, je ne passe en 13è place qu’à ce moment-là,
près de 20 minutes après m’être arrêté.
Pendant encore 40 minutes, les bénévoles vont se relayer
pour me faire changer d’avis, allant jusqu’à user d’arguments qui prêtent
presque à sourire : « regarde, tout le monde est triste, tu peux
pas arrêter ?! ». Je me remets debout de temps en temps, mais c’est
de pire en pire.
Je suis encore 16 ou 17è au bout d’1h, au moment de mon
rapatriement à Gigondas.
Alors pourquoi ?
- La
forme physique est au top, je n’ai même pas mal aux jambes ce matin
- Le
sommeil, la récup’ également. Toutefois, étais-je suffisamment frais au
départ ?
- Les
problèmes de dos sont résolus
- Apparemment
l’alimentation était la bonne
- Les
chaussures étaient neuves, mais ce modèle (la dernière évolution) me
paraît moins amorti que le précédent, contrairement aux revendications de
Salomon
Le fait de partir « à risque » rend nécessaire le
respect de chacune de ces conditions. Tout grain de sable est préjudiciable, et
donc le taux de déchet est important. Cette année j’en suis, pour comparer avec
une poule de foot, à 1 Victoire, 1 Nul, 1 Défaite. L’âge aidant (=
sagesse ??), je ressens le besoin de faire baisser ce niveau de risque,
alors comment ?
- Changer
de marque de chaussure…c’est un coup à avoir un gravier au lieu d’un grain
de sable, parce que celles que j’ai sont certes insuffisamment amorties,
mais ont un chaussant adapté à mon pied très fin
- Ne
plus partir à risque…mais ça fait partie de mon plaisir, de ma motivation,
de rechercher ma course idéale. J’y suis déjà arrivé, ça et le fait
d’entrer dans un top 15 ou 10 sont addictifs
- Compte
tenu du volume et du type d’entrainement que j’ai, et compte-tenu surtout
du fait que le problème qu’il me reste à résoudre est articulaire, me
limiter à des épreuves de maximum 10 ou 11h, qui semble le moment à partir
duquel le grain de sable devient vraiment problématique
1er élément de réponse au THP, à Forcalquier, le
30 Octobre. 78km, j’en aurai pour 10h environ. Je tenterai de partir un peu
plus mollo, les chaussures seront les mêmes (ça coûte cher des chaussures) et
je verrai dans quel état sont mes articulations à l’arrivée.
A+
Nicolas
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