dimanche 7 novembre 2021

THP 2021

 

Bonjour à tous,

 

Samedi 30 Octobre, 82km, 3700m D+/D-. Et météo bien pourrite !

Je vais tuer le suspens, je viens clairement de remettre les pendules à l’heure en prenant une belle revanche sur moi-même.

Il s’agit probablement de mon meilleur trail, le plus constant, le plus abouti, et ce dans des conditions météorologiques difficiles, voire dantesques sur les crêtes de la montagne de Lure.

Si ce n’est pas ma course idéale, c’en n’est pas loin.

 

Et pourtant la confiance n’était pas au beau fixe sur la ligne de départ : je reste sur 1 course mitigée, et 1 ratée, et une cheville douloureuse ne m’a pas rassuré du tout Jeudi lors du dernier entrainement light.

J’ai l’esprit revanchard, de nouvelles chaussures et de la nourriture non solide, c’est déjà ça, mais je ne suis pas sûr d’avoir les moyens de mes ambitions.

 

Départ 6h. Les conditions météo s’annoncent pénibles, d’ailleurs les premières gouttes de pluie commencent à tomber 1 minute avant le départ.

Comme d’hab’, je pars parmi les premiers et me cale ensuite à mon rythme. Tout le monde a l’air bien énervé ce matin parce que je me retrouve autour de la 30è place au-moins.

Confirmation : la cheville gauche me fait mal sur certains appuis, ainsi que ce fichu doigt de pied, gauche aussi,  qui me gène depuis des mois sans que je comprenne ce qui ne lui plait pas.

J’essaie de les protéger en descente, j’espère du coup que je ne crée pas des déséquilibres qui me pénaliseront plus tard.

Je n’ai pas de super sensations non plus.

 

Ravitaillement du 15è, je ne m’arrête pas.

Ravitaillement du 24è, je ne m’arrête pas.

Il pleut sans discontinuer, alternance de pluie fine et de bonnes averses.

Je gère calmement la très longue montée sur le premier sommet de Lure, m’arrête 200m sous le sommet pour mettre ma veste sous mon imperméable. J’espère que ça va suffire, mais j’ai un gros doute. Elle est un peu fine cette veste, je n’ai pas pris de gant, et sur les crêtes il fait 3 ou 4°C, avec de la pluie et un vent à 60km/h…le ressenti est négatif.

On passe au sommet et on redescend assez rapidement sur le ravitaillement du 33è: pas de quoi prendre cher, mais on a un aperçu de ce qui nous attend maintenant et pour une petite dizaine de km, donc pendant plus d’1h…

…Donc on remonte sur les crêtes pour prendre cher…et sans surprise, on prend cher. C’est l’apocalypse là-haut.

Des concurrents du parcours de 44km sont en tenue hivernale, d’autres sont descendus de quelques mètres et se sont mis sous leur couverture de survie, c’est la débandade.

 

En short, avec une veste trop fine et sans gants ni couvre-chef, je suis transi de froid et ai les mains complètement engourdies, j’ai les cuisses toute rouges.

Néanmoins, je vais vivre pendant 1h et quelques un moment assez unique :

J’ai les jambes légères et me permets même d’accélérer pour passer moins de temps sur ces crêtes.

Je ne tremble pas, j’ai les mâchoires douloureuses tellement elles sont crispées, j’en peine à ouvrir la bouche.

J’ai l’impression que mon esprit a ordonné à mon corps de faire abstraction de l’environnement extérieur, et de se mobiliser vers un seul but : passer, coûte que coûte.

Hallucinant : me viens en tête la chanson de Cali « C’est quand le bonheur »

Les éléments se déchainent autour de moi et je suis bien, dans un autre monde. Etanche. C’en est presque perturbant.

 

…Mais faut pas pousser quand même, je suis bien content de perdre de l’altitude après les antennes de Lure.

On redescend au ravitaillement du km 44et là je me rends compte des dégâts que ces conditions ont faites. Une salle a été mise à disposition, qui se retrouve littéralement bondée de participants frigorifiés, certains encore sous leur couverture de survie. Je demande une boisson chaude, mais il n’y en a plus pour l’instant tellement la demande est importante.

Tant pis, je fais quelques assouplissements, prends quelques carrés de chocolat, et repars. 5 minutes d’arrêt. Je repars 20è. 

On se retrouve à l’abri du vent en perdant de l’altitude, par contre je dois faire passer les crampes, séquelles du froid, qui apparaissent dans mes mollets à tour de rôle. Un concurrent devant moi s’écroule en grimaçant de douleur.

Descente très longue, pour une fois je réfléchis un peu et je n’en fais surtout pas trop. Je dois m’économiser, la route est encore longue et la débauche d’énergie là-haut a dû être énorme.

 

On arrive au ravitaillement du 53è, en salle également. Là il y a beaucoup moins de monde, j’en profite pour m’allonger sur le sol et m’étirer le dos.

Je suis envieux d’un des concurrents, qui a une assistance et à qui on donne de quoi se changer intégralement, chaussettes et chaussures comprises.

5 minutes d’arrêt, et c’est reparti…lui sec, moi mouillé.

 

Jusqu’au ravitaillement du km66, beaucoup de mono-traces, bien boueuses, dans lesquelles l’allure est particulièrement lente et énergivore. Je ne savais pas que c’était aussi Mud day aujourd’hui…

Je ne reprends pas de places, mais je me rendrai compte ensuite que j’ai réduit les écarts, car j’en gagne plusieurs entre le 66è et l’arrivée, sur des chemins que je connais bien pour les avoir parcourus en boucle au mois de Mai.

Je me débarrasse dans les 4 ou 5  derniers km des concurrents – Mickaël, Nicolas, Mélanie - qui m’accompagnent depuis un moment, et finis à la 12è place…et 1er de ma catégorie !

J’attends ces 3-là sur la ligne d’arrivée. Pas besoin de palabres : quelques mots, un échange de regard intense et une accolade chaleureuse en disent assez long : on en a bavé, c’est déjà bien d’être arrivés au bout !

 

Allez, on finit en musique (voir la pièce jointe):

Au chant et guitare, David

Au saxophone soprano…

A la vidéo, Huyen, 23 Octobre 2021

 


Nicolas

 

Grand Raid du Ventoux 2021

 

Samedi 18 Septembre 2021

102km – 5400mD+

Laissons le suspens de côté, il s’agit-là d’un échec cuisant, avec un abandon au km 86, alors même que je pointais quasiment depuis le départ en 12è position et que la grande majorité du dénivelé était derrière moi. En cause, des douleurs sous les pieds et aux chevilles qui m’empêchent de courir et presque de marcher.

Tout avait pourtant bien commencé. Parti sur un rythme « à risque », sur la limite, comme d’habitude parce qu’on ne refait pas et que c’est aussi ça qui fait mon plaisir, je campe solidement en 12è position depuis le départ. Excès de confiance ?

Parcours assez roulant avec une majorité de montées pendant les 47 premiers km, au moment où, arrivés presque au sommet du Ventoux, on bascule de l’autre côté. Une grande descente, puis une partie plus technique lorsqu’on traverse les éboulis. La fatigue se fait déjà sentir, mais sans excès, comme cela doit être au bout de 50km.

Arrivé au ravitaillement du km55, là où l’organisation a acheminé notre sac de délestage, j’en profite pour faire le point : j’ai consommé tout ce que j’avais emporté dans mon premier sac, je n’ai qu’à le remplacer par celui que j’ai préparé à l’avance. Je suis fatigué mais pas outre mesure, néanmoins j’ai un peu mal aux chevilles et aux tendons d’Achille, alors je prends les bâtons que j’avais mis dans le sac de délestage, ils me soulageront dans la remontée jusqu’au sommet du Ventoux puis dans la grande descente de 15km qui s’ensuivra. Quelques étirements du dos et des jambes, et je repars requinqué.

Je gère la montée correctement, peut-être un peu trop vite parce que j’encaisse mal la transition avec la descente. Là le terrain est particulièrement technique, avec beaucoup de passages dans les caillasses du Ventoux. J’ai clairement un coup de mou, je m’alimente, prends un gel type « coup de fouet », et fais le dos rond en marchant pour m’économiser. Je me fais dépasser par les 2 concurrents que je vois depuis le départ et que j’avais distancés dans la montée, mais vu la difficulté technique, le temps perdu n’est pas si important.

Le passage à vide ne dure pas trop, tout au plus les 3 ou 4 premiers km les plus compliqués de la descente. Un petit replat sur une piste large me permet de relancer l’allure et de constater que les choses sont rentrées dans l’ordre. Je termine la descente en ayant même repris et re-distancés mes 2 compères. Je pointe au ravitaillement du km76 et refais le point : bien fatigué, mais comme tout le monde ; les pieds et chevilles commencent à me faire souffrir, mais c’est supportable.

Malheureusement, leur état se détériore exponentiellement pendant les 10 km qui suivent, en particulier lors d’un passage en crête bien technique et qui les sollicite beaucoup. La redescente jusqu’au ravitaillement en eau du km 86 devient compliquée, très compliquée.

Le coup au moral est trop gros pour moi ; me revient à l’esprit le spectre du Trail de l’Oisans et du calvaire subi lors des 15 derniers km. Peut-être suis-je mentalement plus tendre aujourd’hui qu’il y a 2 mois, plus fragile, en tout cas je n’ai pas envie de revivre, 2 fois de suite, le même épisode.

Il y a pas mal de bénévoles et d’accompagnants au ravitaillement. Inversement à l’Oisans où j’avais refusé d’écouter les secouristes qui me conseillaient d’abandonner, cette fois on m’encourage, on m’exhorte même à ne pas renoncer. « Tu peux pas arrêter après tout ça, t’es dans les premiers », « t’es tellement loin des délais », « même à 2 à l’heure tu termines largement dans les délais », « pas si près de l’arrivée », etc…

Aux petits soins pour moi, ils me donnent à manger, à boire ; voyant qu’il va leur falloir du temps pour me convaincre de revenir sur ma décision, ils trainent des pieds pour me rapatrier, cherchent des prétextes, me demandent de m’arrêter un moment, 1h s’il le faut, pour réfléchir et pouvoir repartir ensuite. « regarde l’heure qu’il est, tu as tout ton temps ! »

Le problème, c’est que c’est articulaire, et que le temps joue en ma défaveur : plus j’attends et plus le refroidissement raidit mes chevilles, potentialise les douleurs. Je fais quelques essais, mais au bout d’un quart d’heure, je peine à tenir debout ; le simple contact avec mes chaussures est douloureux. La fièvre arrive, je mets mes manchettes, mon coupe-vent, et me mets au soleil, malgré tout je tremble. On me donne 1g de doliprane.

Pour l’anecdote, je ne passe en 13è place qu’à ce moment-là, près de 20 minutes après m’être arrêté.

Pendant encore 40 minutes, les bénévoles vont se relayer pour me faire changer d’avis, allant jusqu’à user d’arguments qui prêtent presque à sourire : « regarde, tout le monde est triste, tu peux pas arrêter ?! ». Je me remets debout de temps en temps, mais c’est de pire en pire.

Je suis encore 16 ou 17è au bout d’1h, au moment de mon rapatriement à Gigondas.

Alors pourquoi ?

  • La forme physique est au top, je n’ai même pas mal aux jambes ce matin
  • Le sommeil, la récup’ également. Toutefois, étais-je suffisamment frais au départ ?
  • Les problèmes de dos sont résolus
  • Apparemment l’alimentation était la bonne
  • Les chaussures étaient neuves, mais ce modèle (la dernière évolution) me paraît moins amorti que le précédent, contrairement aux revendications de Salomon

Le fait de partir « à risque » rend nécessaire le respect de chacune de ces conditions. Tout grain de sable est préjudiciable, et donc le taux de déchet est important. Cette année j’en suis, pour comparer avec une poule de foot, à 1 Victoire, 1 Nul, 1 Défaite. L’âge aidant (= sagesse ??), je ressens le besoin de faire baisser ce niveau de risque, alors comment ?

  • Changer de marque de chaussure…c’est un coup à avoir un gravier au lieu d’un grain de sable, parce que celles que j’ai sont certes insuffisamment amorties, mais ont un chaussant adapté à mon pied très fin
  • Ne plus partir à risque…mais ça fait partie de mon plaisir, de ma motivation, de rechercher ma course idéale. J’y suis déjà arrivé, ça et le fait d’entrer dans un top 15 ou 10 sont addictifs
  • Compte tenu du volume et du type d’entrainement que j’ai, et compte-tenu surtout du fait que le problème qu’il me reste à résoudre est articulaire, me limiter à des épreuves de maximum 10 ou 11h, qui semble le moment à partir duquel le grain de sable devient vraiment problématique

1er élément de réponse au THP, à Forcalquier, le 30 Octobre. 78km, j’en aurai pour 10h environ. Je tenterai de partir un peu plus mollo, les chaussures seront les mêmes (ça coûte cher des chaussures) et je verrai dans quel état sont mes articulations à l’arrivée.

A+

Nicolas

OTT 2021

 Samedi 17 Juillet 2021

OTT, 86km, 4900mD+


Salut à tous,

Un compte-rendu du trail de samedi…Bonne lecture (un peu longue peut-être)

 

Avant-course

 

Lundi 12 : montée de Chamrousse à vélo, dernière séance avec intensité mais sans taper dedans, juste pour être fixé sur l’état des jambes et du cardio : je grimpe à 15 à l’heure, ça rassure

 

Les 3 jours suivant, il fait un temps de cochon…Je comptais sur les balades en famille pour maintenir une petite activité, ce sera repos complet, avec décharge mentale en famille !

 

Un grand moment de solitude jeudi, au moment de mettre une paire de chaussures neuves, histoire qu’elles touchent le sol avant le trail…J’avais commandé par internet le même modèle que d’habitude (pas d’improvisation de dernière minute avec un nouveau modèle !) et vérifié à réception la chaussure droite, juste pour vérifier qu’il y avait bien une étiquette « taille 44 ».

Rassurez-vous, la chaussure droite allait toujours, mais la gauche…est une droite, de Taille 42.5…Horreur !!! Pour Salomon, il fallait un contrôle complet et non une simple identif à réception !!

Heureusement, « Business continuity » oblige, j’ai toujours absolument TOUT en double, y compris le plus improbable, comme…les chaussures. Je vais donc utiliser ma « vieille » paire, un peu tassée mais encore en assez bon état.

 

Plus on approche du départ, plus reviennent en boucle les certitudes, doutes, impatience, inquiétude :

Certitude de ma forme du moment, et impatience d’aller participer à la première vraie épreuve depuis Juillet dernier, qui plus est sur un parcours magnifique, sur les lieux de mes premières randos de gosse !

Certitude que je vais en baver, qui se mue dans les dernières heures en une vraie appréhension; pourvu que je ne sois pas dans un jour « sans » !

Les filières mentales sauront-elle prendre le relai lorsque le physique ne suffira plus ?

 

La tension monte d’un cran pendant les dernières heures…stress et concentration, notamment pendant le trajet d’1h en voiture qui m’emmène à 22H de Chamrousse au départ à Villard-Reculas. Je suis tout seul et ça tombe bien : je n’ai pas du tout envie de parler.

Je sais que cette tension ne va pas me lâcher jusqu’au départ, mais qu’elle disparaîtra dès les premiers kms.

Je passe la dernière heure avant le coup de pistolet, grâce à des exercices de respiration, mais sans m’endormir, à gratter un peu de repos, trouver du relâchement, rassembler mes forces…

 

Je recherche ma course idéale. Pour cela, je vais devoir trouver la limite, fine, entre le « pas assez » et le « trop ». La course est très longue, mais tout peut tenir à tellement peu de choses…

Le départ à minuit et les conditions météo incertaines rajoutent une part d’incertitude et viennent compliquer le tout ; Il va faire froid, on sera probablement mouillés, cela va laisser des traces. L’excès de dépenses se paiera cash en 2è partie de parcours.

 

0h01 – La course

 

Premières impressions : je suis dans un bon jour, les jambes sont légères, je trouve ma place dans les 20 premiers, sans forcer. Je trouve mon rythme rapidement.

Je gère les montées gentiment, perdant toujours 2 ou 3 places, que je récupère dans les descentes. Les pieds se posent comme il faut, tout roule.

 

Terrain très gras à cause des pluies des derniers jours, heureusement le temps tourne au sec juste avant le départ. Restent des nappes de brouillard dont l’humidité perce les vêtements. J’ai mis une veste imperméable et suis trempé en peu de temps par ma propre transpiration, mais je n’ai pas froid.

Un plat-dos au km28 : j’étais jusque-là bien content de mon état général, me voici trempé et maculé de boue.

 

Modification-rajout par rapport à l’édition précédente : au lieu d’une simple montée jusqu’au col de Sarenne, on fait un détour par la Croix de Cassini, qui rajoute 500m de D+ raides, et 500m de D- particulièrement techniques, au point que l’organisation a installé quelques cordes. Il faut rajouter en gros 1h de course par rapport à l’an dernier, donc aussi à mes objectifs (15h30 déçu-15h normal-14h top)

 

Le moral est au beau fixe, je gère la course comme je l’avais prévu ; des douleurs « normales » commencent à apparaître au terme de cette descente de plus de 1000m qui nous amène au ravitaillement km 44.

J’y passe un peu plus de temps pour m’alimenter, parce que même si tout est en apparence sous contrôle, j’ai un sujet d’inquiétude lié à mon alimentation : depuis le départ j’ai du mal à avaler mes petits cakes. C’est récurrent depuis quelques temps, mais jamais à ce point-là.

Le problème aujourd’hui, c’est que je ne m’alimente quasiment qu’aux points de ravitaillement avec des tronçons de bananes, et quelques morceaux de fromage que j’avais emportés. Les raisins secs ne passent pas non plus…en fait tout ce qui a un goût sucré.

En résumé, je suis en déficit calorique et glucidique flagrant. Mais pour l’instant ça passe.

Mon entrainement porte ses fruits, je résiste bien, et les petits coups de mou sont compensés mentalement.

Km 65, le plus dur est fait, montées et descentes. Restent « seulement » 20km.

 

Je repars de ce ravitaillement fatigué, mais pas plus que la moyenne : des concurrents que je côtoie depuis le départ, plusieurs abandonnent à ce moment-là. Je suis toujours dans les 20 premiers.

C’est à partir de maintenant qu’il va falloir souffrir, mais le tout est de maintenir un minimum d’allure, sur un profil moins compliqué, alors je suis confiant.

Je bataille, je suis obligé de me booster régulièrement (en pensant à ma famille, aux encouragements reçus ces derniers jours, ou tout simplement en me mettant un coup de pied aux fesses), et mon plan se déroule sans accroc…

Jusqu’au km 70 : d’un coup, dans un sous-bois plat et pépère, mon corps dit « stop ».

Petite pause, je prends et recrache un petit cake, quelques assouplissements qui sont subitement plus une torture qu’un bienfait…je me force à repartir, mais l’allure chute…ça va passer, me dis-je pour me rassurer, et j’essaie de faire le dos rond jusqu’au km 75, le dernier ravitaillement.

 

Les écarts étaient tels que je n’ai perdu que 5 places pendant ces 5 km pénibles et lents. Malgré cela, je reste malgré tout sur les bases d’un 13h30-14h meilleur que mes prévisions les plus optimistes…mais je sais que je ne tiendrai plus le rythme.

Les secouristes me déconseillent de repartir…inenvisageable pour moi.

J’ai peur de ne pas pouvoir repartir si je traine trop, alors je mange ce que je peux, vide dans la poubelle le monceau de cakes qu’il me reste, recharge mes réserves d’eau avec du sirop de citron pas trop sucré, j’emmène 2 bananes entières.

 

Et le calvaire commence…je vais mettre plus de 3h pour terminer les 10 derniers km.

Je ne cours plus du tout, la marche étant elle-même douloureuse. Mode « sauvegarde » activé, je me bats pour finir. Le moral en a pris un sacré coup aussi.

Je dé-serre les chaussures tellement mes pieds sont douloureux, Je suis arque-bouté sur mes bâtons en descente pour soulager mes pieds-chevilles-genoux, trapèzes et lombaires sont raides, je n’ai plus de bras non plus, le souffle est court en permanence au point de me contraindre à des pauses régulières même sur le plat. C’est interminable.

Je dois vraiment faire appel à tout et tous pour ne pas céder, à 5km du but, aux sirènes de l’abandon, après avoir fini une banane, et l’avoir régurgitée aussi.

Les concurrents me doublent maintenant à la pelle (de mon parcours et aussi du parcours de 40km), beaucoup ont un petit mot d’encouragement. L’un d’entre eux traine même avec moi pendant 5 minutes, me donne de l’eau pure puisque mon sirop de citron ne descend plus non plus.

Je passe la ligne en 45è place, en marchant et tremblant de fièvre. 15h20, proportionnellement, ce n’est même pas plus mauvais que l’an dernier…mais très décevant quand même. Dommage pour la tournée générale, elle a tenu la corde pendant longtemps…

Le speaker s’est apparemment renseigné, trouve mon temps d’arrivée peu conforme au THP Tour et à mes temps de passage…Bon sang, même après la course il faut faire un effort… Je réponds laconiquement que j’en ai bavé dans les 15 derniers km, et remercie l’organisation pour ce parcours magnifique.

 

A+

Nicolas

 

Vue du plateau d’Emparis (km 50) : La Meije et ses glaciers